Éclat Sauvage
Éclat Sauvage
Les chemins qui nous inventent
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Les chemins qui nous inventent

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Avez-vous déjà ressenti ce flottement ?

Ce moment où vous êtes là… sans vraiment être là.

Comme si vous dansiez sur un rythme qui n’était pas le vôtre. Comme si quelque chose ne résonnait pas tout à fait.

On se demande tous, à un moment ou à un autre…

Où est ma place ? Où est-ce que je me sens bien ? Qui suis-je ? Qui ai-je envie d’être ?

Ce n’est pas une destination figée sur une carte, ni une adresse définitive où le GPS annoncerait "Vous êtes arrivé."

C’est un mouvement. Une danse hésitante. Un espace qui se construit, se déconstruit, se réinvente.

Parfois, il y a cette sensation d’être exactement là où l’on doit être. Un instant suspendu où tout semble juste. Et d’autres fois, il y a le doute. Cette impression d’être en décalage.

Avant même de chercher où est notre place, encore faut-il oser l’habiter.
Dire oui à ce qui brûle en nous, et laisser partir ce qui ne nous ressemble plus.

Les cases qui enferment, les couches qui libèrent

Mais on s’habitue vite aux repères qu’on nous propose.

Il paraît que l’ambition, c’est gravir des sommets visibles. Que le bonheur, c’est cocher toutes les bonnes cases, dans le bon ordre. Que la sécurité, c’est rester sur un rivage familier, sans trop s’aventurer au large.

Cela résonne pour certains.

Et pour d’autres, il y a cette sensation d’être coincé dans un vêtement trop ajusté. Une mélodie qui ne fait pas frissonner.

Parce qu’au fond, se trouver, ne se résume pas à réussir. Ce n’est pas atteindre un objectif que le monde applaudit. C’est être aligné avec ce qui nous anime, ce qui nous allume de l’intérieur.

Mais il faut d’abord savoir écouter ce qui nous pousse vers l’avant, ce qui nous arrache au sommeil, ce qui nous fait brûler sans nous consumer.

Tisser son identité

Je l’ai déjà senti. Ce décalage subtil entre ce que je suis et ce que l’on projette sur moi.

Ces questions répétées, souvent mécaniques…

« Tu viens d’où ? »
« Et tu fais quoi dans la vie ? »

Comme si une seule réponse pouvait tout contenir. Comme si nos identités, nos trajectoires, nos élans devaient se tenir en équilibre sur une ligne droite, sans débordement.

Je suis née aux Antilles françaises.
J’ai grandi entre la Guadeloupe, la Martinique et Trinidad.
Puis j’ai vécu entre Londres, Madrid, Paris et Bruxelles.

De partout et d’ailleurs. Un tissage de couches qui se frôlent, se percutent, se mêlent.

C’est ce mélange-là qui m’inspire.

J’ai longtemps cherché une réponse simple qui rassure. Ou peut-être pour éviter d’avoir à tout expliquer.

Mais comment entrer dans une seule forme quand on est fait de mille reflets ?
Quand on navigue entre plusieurs cultures, plusieurs langues, plusieurs élans ?
Quand nos parcours sont mouvants, insaisissables, indéfinis ?

Nos identités sont des passerelles. Ce fil invisible qui nous relie aux autres, qui dessine une place sans que l’on ait à la chercher. Elle est là, entre nos contrastes, nos nuances, nos silences.

Mais souvent, on l’ignore. On cherche en dehors de nous-mêmes. Et c’est là que l’on commence à se déguiser.

Au-delà des apparences, l’essence

On s’intègre.
On s’adapte.
On s’ajuste.
Et, à force… on s’efface.

On adopte des regards apprivoisés, des ambitions bien lisses, des phrases bien pesées.

On devient ce que les autres semblent attendrent, jusqu’à parfois ne plus trop savoir ce que l’on attend de nous-mêmes.

Combien de temps peut-on enfiler un rôle avant qu’il ne nous étouffe plus qu’il ne nous protège ?

Jusqu’à devenir étranger à son propre reflet.

Et parfois, c’est aussi là que l’autre devient un miroir.

L’autre, ce miroir où l’on se découvre

Il y a des regards qui nous voient tels que nous sommes. Des silences dans lesquels on se sent compris. Des conversations qui nous révèlent à nous-mêmes.

Cet été, j’ai rendu visite à des amis dans un pays où chaque sourire semble être une porte ouverte : le Maroc.

Là-bas, les conversations jaillissent de chaque coin de rue. Les odeurs d’épices vous enveloppent comme une promesse de douceur. Les couleurs éclatent et racontent mille histoires. Même les regards ont cette chaleur particulière.

C’est comme si le pays tout entier murmurait : "Bienvenue chez toi."

Un vendredi, j’ai partagé un couscous familial. Un rituel vivant qui rassemble. Où les rires s’entrelacent aux récits. Trois générations réunies. Des voix qui se croisent. Des histoires qui se répondent.

L’humoriste Asmaa El Arabi dit "Pour les Marocains, la monnaie d’échange, ce n’est pas l’argent, c’est l’humain."

Cette phrase prend tout son sens. Parce que tout était là, dans cette chaleur, dans cet accueil sans condition.

Et si, finalement, faire de la place à l’autre, c’était aussi trouver la nôtre ?

Danser avec l’incertitude

Mais on vit dans un monde où l’on mesure la maîtrise et la performance. Où l’on expose nos victoires, mais rarement nos doutes et nos chutes. Où l’on sublime nos réussites, mais on tait les hésitations, les nuits blanches, les routes déviées.

Pourtant, c’est dans l’imperfection qu’on se rencontre.

Que les vraies complicités naissent,
les amitiés profondes,
les amours sincères,
les réorientations qui bouleversent tout.

Il y a un vertige dans l’abandon d’un rôle trop bien appris. Une panique à l’idée de ne plus savoir exactement qui l’on est si l’on cesse d’être ce que les autres attendent.

Mais la vraie rencontre commence quand on laisse tomber le masque.

Quand on arrête d’étouffer nos nuances. Quand on ose dire…

Je ne sais pas. J’hésite. Je cherche encore.

La voix qui ouvre, la voix qui retient

Il y a deux voix en nous.

L’une qui pousse à oser être pleinement soi. Qui souffle un vas-y quand tout en nous hésite. Elle est douce, mais déterminée.

Et puis, il y a l’autre. Celle qui pèse, qui retient, qui s’accroche au connu même si cela étouffe. Celle qui préfère les chemins balisés, les certitudes rassurantes.

Deux voix. L’une qui vous ouvre. L’autre qui vous retient.

Laquelle allez-vous laisser parler le plus fort ?

Je vous laisse avec cette question.

Tendrement,

Charlotte


Liens & crédits :

  • Le son du souvenir : Si vous souhaitez prolonger ce voyage au Maroc, plus précisement à Casablanca, découvrez cette chanson : [Casa (Arabic Version) – Ouidad]

  • Crédits musicaux pour l’extrait à la fin de l’enregistrement : Casa (Arabic Version) – Ouidad. Producteur: Matthieu Mendès. Compositeurs & Auteurs : Ouidad, Brav, Matthieu Mendès. Artiste : Ouidad. Traduction des paroles de l’éxtrait : Les champs d'olivier, les rues animées, le parfum de Casa. Je porte avec moi partout où je vais. La chaleur des sourires des gens de là-bas. Le vent sur le sable, les yeux sous les voiles, l'odeur de la casbah. On a tous une histoire qui commence quelque part (Version française).

  • Citation d’Asmaa El Arabi : Découvrez son univers sur Instagram

  • Image qui accompagne cet éclat et l’enregistrement : Cette photo, je l’ai capturée à la medina de Casablanca, été 2024.

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